Peinture
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"Sa Majesté (rapporte le comte de Souvigny, dans une lettre qu'il écrivait de Valenciennes à son père, le maréchal de Grammont, sous la date du 17 mars, le jour même de la prise de cette ville) s'est enfin résolue de faire attaquer la contrescarpe le matin, estimant qu'elle seroit emportée plus facilement et avec moins de perte de jour que de nuit, les ennemis ne s'y attendant pas, et la chose devant leur paroître impraticable. Il y a eu quatre attaques qui ont commencé en même temps, après le signal, qui était neuf coups de canon. L'on a emporté la contrescarpe sans résistance, puisque tout ce qui était dans l'ouvrage couronné a été tué. Quelques fuyards se sont mis dans la demi-lune revêtue ; les mousquetaires, grenadiers et un grand nombre d'officiers, sont entrés pêle-mêle avec eux dans la demi-lune. Les ennemis y ont encore perdu beaucoup de gens. Ceux qui ont pris le parti de se sauver dans la ville n'ont pas eu un sort plus heureux que leurs confrères. Ils y ont été poussés l'épée dans les reins, et les mêmes mousquetaires et gens que je viens de vous nommer, après avoir fait main-basse partout, sont entrés dans le guichet du pâté, et ensuite ont gagné le rempart de la ville, se sont rendus maîtres du canon et l'ont tiré sur les ennemis, après avoir fait une espèce de retranchement ; ce que je vous mande est la vérité, et moi qui viens de le voir, j'ai peine encore à le croire. Cependant rien n'est plus assuré que le Roi a pris d'assaut, en plein jour, Valenciennes, et en deux heures, étant à vingt pas de la contrescarpe quand on a commencé à marcher. Les chevaliers de Vendôme et d'Anjou, aides-de-camp du Roi, étoient auprès de Sa Majesté. Les ennemis ont perdu tout ce qu'il y avoit dans les dehors, dont il en est resté plus de six cents sur la place. Il y a près de six cents prisonniers. Le comte de Saure, cinq colonels, près de douze cents chevaux, enfin les bourgeois et la garnison, tous pris à discrétion. Voilà ma narration et celle de la matinée qu'a eue Sa Majesté, qui peut être comptée comme une des belles qu’elle aura dans sa vie." (Recueil de Pièces d'histoire, etc., par l'abbé Granet et le P. Desmotels, 3e vol., p. 129, édit. de Paris, 1738)
(M. d. R.)
ministère de la Maison du roi, le
Paris, Musée royal des arts [Musée du Louvre], 1838
1838
Paris
Musée royal des arts [Musée du Louvre]